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Sas et salle de préparation de sortie

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Présentation

Un sas est un dispositif qui permet le passage de personnes et d'objets entre deux milieux différents tout en minimisant les variations de pression et les pertes d'air qui en résultent. Le système consiste en une petite chambre avec deux portes étanches en série qui ne s'ouvrent pas simultanément.

Technologies existantes

Quest est un des modules de la Station spatiale internationale situé dans le segment américain. Installé en 2001, il joue le rôle de sas pour les sorties extravéhiculaires des astronautes.

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Caractéristiques techniques de Quest


Quest est un module d'une masse de 6,1 tonnes à vide, long de 5,5 mètres pour un diamètre maximum de 4 mètres. Il dispose d'un volume pressurisé de 34 m3. Quest est composé de deux cylindres de diamètre différent placés bout à bout, dont la structure est construite en aluminium : le cylindre le plus large, appelé sas d'équipement, est utilisé pour préparer la sortie dans l'espace tandis que le second cylindre plus étroit constitue le sas proprement dit.

Le module Quest avant son intégration à l'ISS

(Doc. NASA)

Le sas d'équipement

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Pour leur sortie dans le vide, les astronautes se préparent dans le cylindre ayant la section la plus importante (appelé sas d'équipement) : ils y enfilent leurs combinaisons spatiales et en testent le bon fonctionnement. Dans leurs scaphandres les astronautes respirent de l'oxygène pur sous faible pression. Pour éviter un accident de décompression, les astronautes, avant leur sortie, séjournent un certain temps dans ce sas en y respirant de l'oxygène pur, pour débarrasser leur organisme de l'azote qui y est contenu. Après la sortie, cette partie du module Quest est utilisée pour remettre en état les combinaisons et les entreposer : en particulier, les batteries y sont rechargées et les réservoirs d'oxygène des combinaisons remplis.

À l'extérieur se trouvent deux grands réservoirs d'oxygène et deux réservoirs d'azote. D'un diamètre de 0,9 mètre et d'une masse de 545,4 kg, ils sont construits en fibre de carbone et sont enveloppés dans plusieurs couches de protection contre les micrométéorites. Ils contiennent 0,42 m3 de gaz stocké sous haute pression. Ces réservoirs servent à la fois à alimenter en gaz la partie américaine de la station spatiale et à remplir les réservoirs des combinaisons spatiales. Ils sont régulièrement remplis par la navette spatiale américaine par l'intermédiaire d'une tuyauterie qui relie le module d'amarrage de celle-ci à Quest en passant par l'intérieur des modules.

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Préparation avant une sortie dans le sas d'équipement

(Doc. NASA)

Le sas

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Le deuxième cylindre est le sas proprement dit. Cette partie de Quest est similaire au sas de la navette spatiale américaine. Le sas permet d'accueillir deux astronautes complètement équipés. De forme cylindrique il dispose d'une ouverture à l'une de ses extrémités débouchant dans le sas d'équipement côté station et d'une autre ouverture sur le côté du cylindre permettant de sortir dans l'espace. Avant l'ouverture de l'écoutille donnant sur l'extérieur, des pompes font le vide en refoulant l'oxygène présent dans des réservoirs évitant ainsi la perte d'un gaz précieux.

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Le sas, ici encore ouvert côté station, permet d'accueillir deux astronautes équipés (Doc. NASA)

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Alvin Drew sort du sas pour commencer une sortie extravéhiculaire

(Doc. NASA)

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Andrew Feustel, réintègre le sas après une sortie extravéhiculaire

(Doc. NASA)

Quelles pressions choisir pour Mars ?

Dans l’habitacle de la navette et dans l’ISS la pression est à 1 bar, identique à la pression atmosphérique (100.000 pascal en unités légales, 1 kilogramme force par cm2 en unités anciennes). La composition est aussi identique à celle de l’atmosphère terrestre : 0,79 bar d’azote et 0,21 bar d’oxygène. C’est bien sûr l’oxygène qui est nécessaire à notre confort respiratoire Lorsque les astronautes se préparent à exécuter une sortie dans l’espace, ils passent 4 heures dans le sas à respirer de l’oxygène pur.


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Une autre procédure, utilisée ces dernières années, consiste à respirer de l’oxygène pur pendant une heure puis, juste avant la fin de cette période, à dépressuriser l’ensemble de l’habitacle à 0,7 bar en gardant toujours 0,2 bar d’oxygène. Ces caractéristiques sont maintenues pendant 12 heures, à la fin desquelles les astronautes qui sortent, respirent à nouveau de l’oxygène pur pendant 40 minutes. Ainsi une sortie rapide n’est pas possible. Pourquoi ? Parce que les pressions sont différentes dans la navette et dans le scaphandre (une fois dans l’espace). Les scaphandres doivent être pressurisés au minimum pour faciliter les mouvements, la pression interne rigidifiant les scaphandres quels que soient les dispositifs de compensation de pression installés au niveau des articulations. Le scaphandre navette est ainsi pressurisé à 0,3 b. Et il n’est pas possible de passer brutalement de 1 bar à 0,3 sans risquer un accident de décompression comme un plongeur qui remonterait trop vite.

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Un scaphandre opérationnel, adapté à l’exploration longue durée d’une planète, ne doit pas entraver les mouvements ou entraîner une fatigue rapide de l’astronaute. (Doc. équipage MDRS 7).

Le phénomène redouté est le dégazage de l’azote dans le sang et les tissus du corps. Les bulles dans le sang si elles ne sont pas microscopiques conduisent à des accidents par manque d’irrigation en particulier de zones du cerveau qui conduisent à des paralysies locales ou même à la mort. Tout le monde sait ce qui se passe lorsque l’on ouvre une boisson gazeuse sous pression interne. Le gaz (en l’occurrence du gaz carbonique) qui jusque-là était dissous dans le liquide, passe à l’état gazeux d’une manière quelque fois si brutale que le mélange liquide gaz vient arroser le candidat buveur. Quand un liquide et un gaz sont en contact, du gaz se dissout dans le liquide jusqu’à un certain équilibre entre la pression de gaz et la concentration du gaz (masse de gaz divisée par le volume) dans le liquide. Il y a proportionnalité entre les deux. Si la pression au-dessus du liquide est multipliée par 2, la concentration dans le liquide est multipliée par 2 aussi. En partant de l’état d’équilibre, si l’on baisse la pression instantanément mais d’une petite quantité il n’y aura pas de dégazage de bulles. Mais si on baisse la pression d’une grande quantité, il va y avoir des bulles. On a ainsi le droit d’avoir une concentration dans le liquide plus élevée que ce que permet la pression externe mais il ne faut pas exagérer. La limite à partir de laquelle des bulles vont se dégager définit un coefficient de sursaturation critique. Ce coefficient de sursaturation critique est le rapport entre la pression de gaz qui correspondait à l’équilibre avec la concentration qu’il y a dans le liquide, et la pression de gaz nouvelle, plus basse, à laquelle des bulles vont se dégager :


Csc = P équilibre/ P où bulles apparaissent


Dans le corps humain, pour les tissus les plus critiques, cette valeur est d’environ 1,5. La pression peut passer de 3 à 2 bar sans qu’il y ait apparition de bulles (c’est limite !). Si on passe de 3 à 1 bar, il y a apparition de bulles. Telle est la loi physique quand on ne parle que d’un seul gaz. Quand il y a mélange de gaz il faut considérer qu’au numérateur on ne prend que la pression partielle du gaz considéré. Dans de l’air à 1 bar qui contient 79% d’azote la pression partielle d’azote est de 0,79 bar.

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Pour un plongeur ayant séjourné longtemps à 23 m (pression partielle d’azote 2,6 bar), s’il remonte brutalement à la surface, le risque d’accident de décompression est, en première approximation, le même que pour un astronaute navette qui sortirait rapidement en scaphandre. Dans les deux cas le coefficient de sursaturation vaut 2,6. (Doc. A. Souchier).

Si on monte brutalement du niveau de la mer au sommet du Mont Blanc (passage de 1 bar à 0,554 bar) le coefficient de sursaturation vaut : 0,79/0,554=1,43. On est encore à la limite de l’acceptable. En fait les données disponibles indiquent 5% de risque d’accident quand on monte brutalement à 6250 m soit 0,456 bar. Dans ce cas le coefficient vaut 1,73. On vérifie bien qu’il est au-dessus de l’acceptable. Il en est de même pour l’astronaute navette qui sortirait brutalement dans son scaphandre à 0,3 bar : le coefficient atteint 2,6.


Pour descendre la concentration d’azote dans le sang avant de se trouver exposé à une pression plus faible, il y a deux méthodes : baisser la pression (progressivement ou par paliers) ou bien respirer de l’oxygène pur. Quand on respire de l’oxygène pur, l’azote contenu dans les tissus et dans le sang ne trouve pas de contre pression d’azote externe : il dégaze, et sans violence puisque le coefficient de saturation vaut 0,8/1=0,8. C’est cette procédure que suivent les astronautes navette.


Sur Mars comme sur la Lune, il faudra utiliser des scaphandres aussi peu pressurisés que possible afin de minimiser la fatigue des astronautes. Une pression de 0,21 bar avec une atmosphère d’oxygène pur, offre le même confort respiratoire que sur Terre au niveau de la mer puisque sous 1 bar et avec 21 % d’oxygène dans l’air, la pression partielle d’oxygène y est aussi de 0,21 bar.

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L’auteur dans le caisson d’altitude de la cité de l’air à Paris en 1988 à l’occasion d’un test préparatoire à des vols en avion 0 g. La montée à 5500 m est effectuée en 8 mn. La pression n’est plus que de 0,5 bar ; le coefficient vaut presque 1,6 ce qui est élevé vis à vis des risques d’accident de décompression. Mais ceux ci dépendent aussi du temps passé à faible pression. (doc. A. Souchier).

L’essoufflement que l’on ressent en altitude n’est en effet pas lié à la baisse de la pression totale mais à la baisse de pression partielle d’oxygène. C’est pourquoi l’alpiniste qui respire de l’oxygène pur voit disparaître les symptômes liés à l’altitude. En fait les scaphandres Apollo étaient à 0,26 bar d’oxygène pur. Si l’habitat est à la même pression (cas du module lunaire), il n’y a pas besoin de temps de décompression pour sortir ; on pourrait donc adopter cette solution pour l’habitat martien ; mais cette composition d’atmosphère favorise les risques d’incendie et il est souhaitable d’ajouter de l’azote. Ainsi une pression totale de 0,52 bar avec 0,26 bar d’oxygène et 0,26 bar d’azote minimise fortement les risques d’incendie tout en autorisant des sorties rapides avec un bon coefficient de sécurité. Le coefficient de saturation vaut :


0,26 (azote habitat)/0,26 (scaphandre) = 1


et l’on est donc loin de la valeur critique de 1,5. Il faut noter que cette valeur de 1,5 est valable pour le plongeur sous-marin qui remonte à la surface, alors que la médecine aérospatiale considère qu’il y a encore risque à 1,4 quant il s’agit de descendre à une pression faible par rapport à la pression atmosphérique. Cela serait dû au fait qu’un bulle de masse donnée est 5 fois plus grosse à 0,2 bar qu’à 1 bar. Un coefficient de 1 ,2 serait acceptable, ce qui autorise dans l’habitat 0,26 bar d’oxygène et 0,31 d’azote pour une pression totale de 0,57 bar.


La première station orbitale US, Skylab avait une pression de 0,35 bar avec 0,25 bar d’oxygène ce qui autorisait des sorties sans procédures particulières. Mais ces caractéristiques favorables avaient tout de même quelques inconvénients. Au repos les astronautes avaient une sensation de chaud lié au fait que la convection dans un air moins dense évacuait moins la chaleur du corps.

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Sur Mars on voudra pouvoir sortir rapidement de l’habitat sans subir de longues périodes de décompression. Il faut choisir en conséquence la pression et la composition de l’atmosphère interne.(doc. A. Souchier ; maquette APM).

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La même question se pose pour un véhicule pressurisé. En exploration sur le terrain les astronautes ne voudront pas perdre du temps dans des opérations fastidieuses de décompression. (doc.NASA).

En cas d’exercice la situation s’inversait : la sueur s’évaporant plus vite, le refroidissement est plus rapide que sous un bar. De même à la fin d’une douche les astronautes ont signalé une sensation de froid plus intense liée à l’évaporation plus rapide des gouttes d’eau. La faible pression empêche aussi la voix de porter loin. Elle limite également le refroidissement par convection naturelle des équipements électriques et électroniques et il faut penser à les requalifier dans ces conditions. Enfin la présence de 30 % d’azote n’est pas suffisante pour limiter fortement les risques d’incendie. Sur Skylab il avait fallu interdire les peintures (remplacées par de l’oxydation anodique sur les murs) et les vêtements étaient en polybenzimidizole, une matière impossible à laver !


Dans le programme navette un intense programme de qualification a permis de sélectionner des matériaux ininflammables sous 30% d’oxygène. Un nouveau programme de sélection serait nécessaire pour l’habitat martien à 0,57 bar et 46% d’oxygène proposé dans cet article. Du moins la pression plus élevée que dans Skylab permettrait de limiter les défauts signalés par les astronautes de cette station. Et la pression totale de 0,57 bar correspond à une altitude de 4600 m à laquelle vivent couramment des humains (avec 2 fois moins d’oxygène que ce qui est proposé) et aussi… des appareils électroniques !

D’autres solutions ont été proposées : réserver une partie de l’habitat à ceux qui exécutent les sorties. Ils vivraient ainsi à une pression différente des autres membres d’équipage. Pas très réaliste tant que l’on n’en sera pas au stade des villes martiennes. Une autre solution, plus astucieuse, consiste à faire fonctionner le scaphandre à une pression plus élevée au début de la sortie et à baisser progressivement la pression quand la désaturation en azote de l’astronaute le permet. Il faut que le scaphandre soit dimensionné pour cela, mais cette voie est intéressante si le taux d’oxygène à 46% proposé dans cet article s’avère trop gênant vis à vis des risques d’inflammation des matériaux. Avec un début de sortie à 0,4 bar dans le scaphandre, on pourrait avoir un habitat à 0,21 bar d’oxygène et 0,48 bar d’azote soit 0,69 bar de pression totale ne contenant donc que 30% d’oxygène. L’habitat et tout son équipement pourrait faire alors usage des matériaux ininflammables qualifiés pour la navette dans ces mêmes conditions.

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Dans les habitats martiens simulés de la Mars Society les équipages définissent eux-mêmes les temps de simulation de décompression dans le sas. Certains se contentent d’un temps très court en supposant que les compositions et pression dans l’habitat et les scaphandres ne créent pas de risque d’accident de décompression. D’autres choisissent des temps de 10 mn ou plus. (doc. équipage MDRS 40 Mona Lisa).

D’après un article rédigé par Alain Souchier : Lien

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