Stockage de l'eau (H2O)
Présentation
Les différentes sondes envoyées depuis un demi-siècle ont permis d'analyser et localiser l'eau. On sait aujourd'hui que les conditions martiennes sont extrêmes : la température moyenne y est de -53°C et la pression moyenne au sol est de 6 mbar. L'eau ne peut donc pas rester stable à l’état liquide dans ces conditions, il faut alors prévoir des réservoirs pressurisés, chauffés et isolés de la température extérieur. Comme l'indique le diagramme ci-dessous représentant les états de l’eau en fonction de la pression (ordonnée) et de la température (abscisse) montre clairement pourquoi la présence d’eau liquide à la surface de Mars est impossible. Du fait de la faible pression sur Mars (600 Pa), la température, même si elle était importante, ne permettrait pas la présence d’eau liquide. Ainsi pour conserver l'eau liquide dans le réservoir, il faudrait maintenir la température du réservoir à plus de 273°K (0°C) et à plus de 0.01bar de pression.
Consomation d'eau
Pour les colons
Il existe dans ce domaine des estimations en ce qui concerne les consommations des équipages spatiaux. On peut retenir :
-pour l’eau potable : 1,7 l pour la boisson, 0,8 l pour la préparation de la nourriture, soit un total de 2,5 l/jour/personne ;
-pour l’eau domestique : 20 l/jour/personne, même si des expériences, menées en particulier par la Mars Society dans sa base de simulation de l’Arctique, ont montré qu’il était possible de se restreindre à 4 à ou 5 litres ; mais ce qui est envisageable dans une mission spatiale de durée limitée n’est sans doute pas désirable pour le confort d’un colon ;
Ces consommations quotidiennes doivent être corrigées des taux de recyclage pour conduire aux besoins globaux :
-pour l’eau, on suppose un taux de recyclage moyen de 90 %, ce qui sera certainement atteignable à l’époque et conduit à un apport de 2,25 T/j (pour un débit total de 22.5 T/j) ;
Pour les serres
En ce qui concerne l’irrigation des cultures, on peut faire l’hypothèse qu’elle est assurée par les eaux usées des colons (l’eau accomplirait une boucle globale : usage humain => traitement pour irrigation => usage agricole => traitement final pour usage humain => réutilisation).
En effet, le débit journalier pour les besoins humains, évalué à 22 500 litres, correspond, pour une production quotidienne totale d’aliments (état naturel) de 1,8 kg x 1 000, à un apport en eau de 12,5 l/kg d’aliments (auquel correspond, pour une surface cultivée totale évaluée à 3 ha, une irrigation de 0,75 litre/m² de culture/jour).
En termes de besoin, la littérature indique, pour la culture des tomates, hydroponique, en serre chauffée et en circuit fermé, un apport pouvant être réduit à 15 l/kg. Sachant que la tomate présente un rendement d’irrigation assez moyen (1000 l/kg de matière sèche en plein champ, contre 500 pour la pomme de terre), nous prendrons comme apport nécessaire une valeur moyenne entre ces deux cultures, soit un besoin d’un peu plus de 11 l/kg, en bonne concordance avec la capacité de 12,5 l/kg considérée
(une déperdition de 10 % reste permise).
Pour la production H2/O2
En ce qui concerne l’infrastructure de transport, nous avons retenu les niveaux de performance visées par le projet Starship de SpaceX, avec une charge utile déposée sur Mars de 100 T, pouvant inclure jusqu’à 100 passagers.
Nous avons retenu 12 transferts par fenêtre.
On peut estimer les besoins en propergol correspondant et ainsi en déduire les besoins en eau.
Ainsi il faut prévoir de produire 0,7T/j d'eau soit 255,5T/an.
Recyclage de l'eau
Récupérer l’urine est élémentaire ; récupérer l’eau de la transpiration n’est guère plus difficile, puisqu’il suffit de filtrer l’air de la cabine pour en condenser la vapeur d’eau. Filtrer l’urine de manière à la rendre utilisable, voire potable, est plus complexe et fait intervenir des équipements sophistiqués—qui doivent être infaillibles puisque la vie des astronautes en dépend—et eux-mêmes assez lourds.
Dans les laboratoires au sol comme dans la Station Spatiale Internationale (ISS), on travaille sur la question. Dans la station, le système de régénération d’eau est volumineux (la taille de deux réfrigérateurs) et pèse près de trois tonnes. Il consiste en plusieurs unités, dont un distillateur d’urine : on évapore l’urine, de sorte qu’une vapeur d’eau plus ou moins pure se sépare d’un reliquat d’impuretés (une forme de saumure). Encore faut-il tenir compte du fait qu’en impesanteur, liquide et gaz ne peuvent pas se séparer pas simple gravité. Il faut donc contourner le problème en mettant la « cocotte minute » en rotation, créant une force centrifuge qui plaque les impuretés liquides sur les parois périphériques, alors que la vapeur d’eau est aspirée et évacuée au bout du système. Cette eau prétraitée est alors condensée et rejoint celle récupérée en parallèle par condensation de la vapeur d’eau de la cabine (la sueur des astronautes).
Le système de contrôle et de recyclage de l’environnement (ECLSS) contenant le sous-système de recyclage de l’eau (WRS) occupe plusieurs racks à bord de la Station Spatiale Internaionale. (crédit: NASA/MSFC)
L’eau subit alors plusieurs filtrages par osmose à travers des membranes qui laissent passer les molécules d’eau, mais pas les molécules plus grosses qui sont retenues par les filtres. Pour les molécules plus petites et plus volatiles, une réaction oxydante (catalytique) est alors opérée à haute température. Un test de la pureté de l’eau est effectuée en fin de réseau par transmission électrique : une eau avec des impuretés transmet mieux l’électricité que de l’eau pure. Si l’eau est bonne, elle gagne le réservoir de stockage : on peut la boire. Si elle laisse à désirer, elle est renvoyée une nouvelle fois dans la boucle de purification.
À l’arrivée, on arrive à recycler l’eau à 90 % (pas totalement, car il y a toujours des pertes). Pour la Station Spatiale, quelques petits problèmes restent à régler et des pannes peuvent faire chuter le rendement, mais concernant Mars il faudra être infaillible.
Le distillateur d’urine est un élément clef du système de recyclage. (crédit NASA)